Pendant plus d’une décennie, la Suède a été considérée comme un pionnier de la numérisation de l’éducation. Tablettes dès la maternelle, manuels scolaires remplacés par des ressources en ligne, cours digitalisés : tout semblait indiquer que l’école de demain était déjà une réalité dans ce pays scandinave. Pourtant, en 2023, le gouvernement suédois a opéré un virage significatif. Face à des résultats préoccupants en lecture et en compréhension écrite, la Suède a décidé de réintroduire les manuels scolaires imprimés dans les salles de classe.
Une expérimentation aux résultats mitigés
Le système éducatif suédois avait parié sur le numérique pour stimuler l’apprentissage et familiariser les élèves aux outils technologiques dès le plus jeune âge. Mais ce choix a fini par susciter de vives inquiétudes. Entre 2016 et 2021, le niveau des élèves de 10 ans en lecture a chuté de manière notable. Selon l’étude internationale PIRLS, le pourcentage d’élèves ayant des difficultés de lecture est passé de 12 à 19 pour cent en cinq ans.
Ce constat a conduit le gouvernement à remettre en question la place centrale accordée aux écrans dans l’apprentissage. La ministre de l’Éducation, Lotta Edholm, a déclaré que l’introduction massive du numérique à l’école avait été menée sans suffisamment d’esprit critique, qualifiant cette politique d’expérimentation.
Un retour aux fondamentaux
Pour remédier à cette situation, le gouvernement suédois a décidé de renforcer l’usage des manuels papier. Un budget de 60 millions d’euros a été alloué pour que chaque élève dispose d’un manuel imprimé pour chaque matière. Cette mesure vise à garantir un meilleur ancrage des savoirs fondamentaux, notamment en lecture, en écriture et en mathématiques.
Il ne s’agit pas d’abandonner complètement le numérique, mais plutôt de rétablir un équilibre. Les outils digitaux conservent leur place dans certaines activités pédagogiques, mais ils ne doivent plus remplacer les supports classiques lorsqu’il s’agit d’acquérir les bases de l’apprentissage.
Des leçons pour d’autres pays
Ce revirement suédois pourrait inspirer d’autres pays, notamment ceux qui s’interrogent sur les effets du numérique sur le développement cognitif des enfants. Si les nouvelles technologies ont leur place dans l’éducation, leur utilisation doit être mesurée, adaptée à l’âge des élèves et encadrée par une pédagogie réfléchie.
Le cas suédois rappelle que l’innovation, aussi séduisante soit-elle, ne peut se substituer à une approche fondée sur des preuves concrètes. Lire sur un livre papier, écrire à la main, manipuler un manuel : autant d’activités apparemment simples, mais essentielles à la construction des compétences durables.