Un médicament que l’on pense anodin pourrait finalement présenter des risques inattendus. Selon une étude nordique de grande ampleur, certains traitements utilisés par des millions de Français augmenteraient significativement le risque de développer un type rare de tumeur gastrique, en particulier avant 65 ans. De quoi s’agit-il exactement et que faut-il retenir de ces résultats
Un médicament très courant au cœur des inquiétudes
Les inhibiteurs de la pompe à protons, appelés IPP, sont parmi les médicaments les plus prescrits en France. Ils sont utilisés pour traiter des troubles fréquents comme le reflux gastro-œsophagien, les brûlures d’estomac, les remontées acides ou certaines formes d’ulcère. Selon les données de la Haute Autorité de santé, près de 16 millions de Français sont concernés chaque année.
Parmi ces médicaments, on retrouve notamment l’ésoméprazole, l’oméprazole, le lansoprazole, le pantoprazole et le rabéprazole, ainsi que leurs génériques.
Leur objectif est simple : réduire la production d’acide gastrique. Mais c’est précisément ce mécanisme qui soulève aujourd’hui des interrogations.
Une étude sur 24 ans qui alerte
Lors du Congrès européen de gastro-entérologie qui s’est tenu à Berlin du 4 au 7 octobre 2025, les résultats d’un vaste projet de recherche baptisé NordGETS ont été dévoilés. Cette étude a analysé les dossiers médicaux de plusieurs pays nordiques sur une période de 24 ans.
Deux groupes ont été comparés
– 1 790 patients atteints de néoplasies neuroendocrines gastriques (NEN), des tumeurs rares et généralement lentes à évoluer
– 17 000 personnes en bonne santé, utilisées comme groupe témoin
Les chercheurs ont également neutralisé plusieurs facteurs pouvant influencer les résultats, notamment l’infection à Helicobacter pylori, connue pour provoquer des inflammations de l’estomac, ou la gastrite atrophique chronique.
À l’issue de ces ajustements, le constat est clair.
Un risque accru de 83 pour cent, surtout avant 65 ans
Selon les données publiées, les personnes prenant des IPP sur le long terme présentent un risque augmenté de 83 pour cent de développer un NEN gastrique. Ce risque est nettement plus marqué chez les moins de 65 ans.
Pourquoi un tel lien Les scientifiques suspectent que la baisse prolongée de l’acidité gastrique pousse l’estomac à produire davantage de gastrine, une hormone qui, en excès, pourrait stimuler la croissance de cellules pouvant évoluer en tumeur.
Cela ne signifie pas que les IPP causent directement un cancer, mais qu’ils peuvent favoriser un terrain plus propice à ce type de tumeur chez certaines personnes, surtout en cas d’usage prolongé.
Faut-il arrêter de prendre ces médicaments
Malgré l’inquiétude suscité par ces résultats, les chercheurs appellent à la prudence et à la nuance. Le Dr Eivind Ness-Jensen, auteur principal de l’étude, rappelle que les NEN gastriques demeurent extrêmement rares. Même avec l’augmentation relative du risque, le risque absolu pour chaque patient reste faible.
En d’autres termes, ces données ne justifient pas un arrêt brutal des traitements. Les IPP restent utiles et nécessaires pour de nombreux patients, notamment en cas de reflux sévère, d’ulcères ou de traitements nécessitant une protection gastrique.
Le message essentiel est le suivant
– Éviter de prendre des IPP sans indication médicale
– Ne pas les utiliser sur le long terme sans suivi
– Toujours discuter d’un éventuel arrêt ou d’une alternative avec son médecin
Ce qu’il faut retenir
Les IPP sont efficaces et très utilisés, mais ils ne sont pas aussi anodins qu’on le pensait. Cette nouvelle étude met en lumière un risque accru de tumeurs gastriques rares, surtout avant 65 ans, lorsque ces médicaments sont consommés sur une longue période.
Pour autant, il ne s’agit pas de provoquer la panique. Le risque reste faible, et ces traitements demeurent essentiels pour certains patients. La meilleure démarche reste de se faire accompagner par un professionnel de santé afin d’adapter son traitement au plus juste.