En matière de sécurité routière, les excès de vitesse sont régulièrement pointés du doigt. Mais rouler trop lentement peut aussi coûter cher, comme en témoigne l’histoire pour le moins étonnante de Bernadette Bandelier, une retraitée suisse de 65 ans, lourdement sanctionnée pour avoir… conduit trop lentement dans les virages d’un col de montagne.
Une amende de 2 500 francs pour excès de prudence
En février 2022, alors qu’elle rentrait d’une course hippique à Saint-Moritz en transportant des chevaux à bord de son véhicule utilitaire, Bernadette Bandelier a été arrêtée sur le col du Julier pour une vitesse jugée anormalement basse : entre 15 et 20 km/h. Cette conduite, qu’elle estimait nécessaire compte tenu de la configuration de la route et de la présence d’animaux à bord, a été interprétée comme un danger potentiel par les autorités locales.
Suite à un appel anonyme, la police l’a interceptée pour un contrôle de près de deux heures, effectué sous une température glaciale de -6 °C. Ce long arrêt a eu pour effet de rallonger son trajet de plusieurs heures et de mettre ses chevaux dans une situation inconfortable. Malgré ses explications et les circonstances particulières, une amende initiale de 300 francs suisses lui a été infligée.
Une contestation qui tourne au cauchemar administratif
Persuadée de l’injustice de la sanction, Bernadette Bandelier a décidé de contester l’amende. Encouragée par un ami bénéficiant d’une assurance juridique, elle a entrepris des démarches pour faire valoir ses arguments. Mais son recours a été rejeté, et les frais de procédure sont venus gonfler le montant à 2 500 francs suisses.
Cette somme, bien au-delà de ses capacités financières immédiates, est devenue une source majeure d’angoisse pour la sexagénaire, d’autant plus qu’elle souffre d’une maladie pulmonaire chronique qui complique ses démarches et fragilise encore davantage sa situation.
Quatre années de remboursement pour une infraction controversée
Avec un revenu mensuel de 3 500 francs suisses, Bernadette ne dispose que de 900 francs de reste à vivre une fois ses charges réglées, notamment des frais d’assurance maladie très élevés en Suisse. Dans ce contexte, elle n’a eu d’autre choix que d’accepter un échelonnement du paiement, remboursant 50 francs par mois. À ce rythme, elle devra attendre quatre ans avant de solder l’intégralité de l’amende.
Aujourd’hui, épuisée par des mois de démarches administratives infructueuses, elle a mis fin à toute contestation. « Je n’en pouvais tout simplement plus », confie-t-elle. Elle assume désormais le remboursement avec résignation, bien qu’elle continue à penser que sa conduite était avant tout motivée par la prudence et le respect du bien-être animal.
Une affaire qui interroge
L’histoire de Bernadette Bandelier soulève de nombreuses questions. La législation routière, nécessaire pour garantir la sécurité de tous, peut-elle parfois manquer de discernement face à des situations particulières ? Une conductrice expérimentée, roulant lentement pour assurer la sécurité d’animaux vivants transportés dans des conditions hivernales, mérite-t-elle une sanction aussi lourde ? Et au-delà de la question juridique, se pose celle de la justice sociale : comment peut-on justifier une amende qui dépasse largement les capacités de remboursement d’une retraitée déjà fragilisée ?
Ce cas illustre les limites d’un système parfois rigide, où les circonstances individuelles sont trop peu prises en compte. Et rappelle qu’en matière de justice, le bon sens ne devrait jamais être sacrifié sur l’autel de la procédure.