À 74 ans, Marc profite d’une retraite que beaucoup qualifieraient de confortable : 4 130 € nets par mois. Pourtant, le métier qui lui a permis d’atteindre un tel niveau de pension est loin de faire rêver. Pendant plus de trente ans, il a exercé une profession souvent critiquée, redoutée, voire détestée.
Aujourd’hui, il revendique fièrement son parcours, et son témoignage met en lumière les grandes inégalités du système de retraite français.
Un métier controversé mais rentable
Le métier qu’a exercé Marc pendant plus de trois décennies n’est autre que celui de huissier de justice, devenu depuis la réforme de 2022 commissaire de justice.
Ce poste, perçu par beaucoup comme austère, voire impitoyable, est pourtant l’un des plus rémunérateurs du secteur libéral. Derrière les missions délicates — constats, recouvrements, expulsions — se cache une activité exigeante, encadrée, mais financièrement solide.
« C’était un métier difficile, parfois ingrat, confie Marc. On passait pour les méchants, mais on servait avant tout la loi. »
Grâce à des revenus élevés — souvent compris entre 6 000 et 10 000 € par mois selon les périodes — et à un régime de retraite avantageux, Marc a pu cotiser pleinement pendant 33 ans. Résultat : une pension mensuelle de 4 130 €, bien supérieure à la moyenne nationale.
Des régimes de retraite plus généreux que le régime général
Comme de nombreuses professions libérales, les huissiers relèvent d’un système de retraite spécifique : la CNAVPL pour la retraite de base et la CAVOM pour la complémentaire.
Ce double régime, basé sur un système de points, favorise les carrières longues et les revenus soutenus. Contrairement aux salariés du régime général, les professions libérales cotisent davantage, mais bénéficient aussi de rendements supérieurs à la retraite.
Ainsi, après trois décennies d’exercice, Marc a pu partir à taux plein et percevoir une pension qui reflète ses efforts constants et le coût des cotisations versées tout au long de sa carrière.
Un exemple qui illustre les inégalités du système français
Le parcours de Marc rappelle une réalité souvent ignorée : toutes les retraites ne se valent pas.
En France, selon les données de la DREES, la pension moyenne tourne autour de 1 400 € nets par mois. Mais derrière ce chiffre se cachent des écarts considérables : un cadre du privé touche en moyenne 2 400 €, tandis qu’un ouvrier doit souvent se contenter de moins de 1 200 €.
Les professions libérales, elles, occupent une place à part. Si elles prennent plus de risques au cours de leur vie professionnelle, elles peuvent, à long terme, bénéficier d’un revenu de retraite bien plus confortable.
« Ce n’est pas un hasard si certains métiers mal aimés offrent de meilleures retraites », explique Marc. « Peu de gens veulent les exercer, mais ceux qui s’y investissent sont récompensés à la fin. »
Une question d’équité
Le cas de Marc interroge sur l’équité du modèle français. Faut-il continuer à accepter de tels écarts entre les différentes catégories professionnelles ?
Si certains profitent d’une sécurité financière enviable, la majorité des retraités peinent à joindre les deux bouts.
Pour beaucoup, le système devrait évoluer vers plus d’équilibre, tout en reconnaissant les contraintes et les responsabilités propres à chaque métier.
En somme, le parcours de cet ancien huissier rappelle qu’un métier décrié peut, avec le temps, offrir une stabilité que bien d’autres n’auront jamais. Une leçon de persévérance — mais aussi un miroir des inégalités persistantes de notre société.

